La première dérogation dure depuis 1999, année de l'adoption de la directive 1999/77 qui interdit l'utilisation de l'amiante. Sa prolongation a été décidée, vendredi dernier, dans le cadre de l'adoption de l'annexe XVII du règlement Reach relatif à l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques. Cette annexe, applicable à partir du 1er juin 2009, transfère dans Reach la directive 1976/769 relative « à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses », dont la directive de 1999 porte « adaptation au progrès technique ».
La crise utilisée comme argument par l'industrie de la chimie
Les usines qui bénéficient de la dérogation devront « soumettre dans deux ans au maximum un rapport sur les progrès liés aux alternatives », indique Ton Van Lierop. Ces usines opèrent principalement dans le secteur du chlore, et utilisent des diaphragmes à amiante.
« Ces entreprises nous ont dit qu'elles couraient des risques économiques énormes si on leur refusait l'usage de l'amiante, à cause de la crise », continue Ton Van Lierop. « Les syndicats des entreprises concernées nous ont dit qu'elles avaient obtenu l'assurance d'une absence de risque pour les ouvriers », justifie encore le porte-parole de la Commission européenne.
La deuxième dérogation décidée permet aux États membres de demander des dérogations pour les articles contenant de l'amiante (et non les fibres d'amiante) produits avant 2005. « Il y aura des conditions spécifiques, notamment sur la protection des personnels sur place », indique la représentation permanente de la France auprès de l'UE à l'AEDD
Ces deux exemptions « représentent une régression considérable par rapport aux principes de Reach », juge l'Etui (Institut syndical européen). S'agissant de la première, « l'alternative à l'amiante existe. La preuve : la majorité des entreprises se sont adaptées. Ce qui compte, c'est l'existence d'une alternative, pas qu'une entreprise soit disposée ou non à faire les investissements nécessaires », déclare à l'AEDD Laurent Vogel, directeur du département santé-sécurité d'Etui.
Quant au rapport demandé sur les alternatives, « le problème, c'est que les procédures de Reach sont terriblement longues. L'Union européenne a donc donné son feu vert au minimum jusqu'en 2015 », analyse encore Laurent Vogel.
S'agissant de la seconde exemption, elle ne convient pas non plus au mouvement syndical européen : « Nous aurions préféré une liste positive de biens amiantés. Elle aurait pu comprendre les biens immobiliers, ou encore les échantillons amiantés des musées, comme le réclame le Royaume-Uni », estime le représentant syndical.
Il espère désormais que le Parlement européen utilise son droit de se prononcer sur ces dispositions dans les prochains mois. « Il y a une forte sensibilité des eurodéputés sur le dossier de l'amiante, même si elle est moins forte qu'en France », analyse Laurent Vogel. Cependant, les élections européennes de juin 2009 pourraient contrarier la procédure.
Source : LA LETTRE DE LA SECURITE
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