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Un exemple-type de risque sous-estimé et sous-évalué, les poussières de bois

Classé dans la catégorie : Risques pour l'Homme au travail

Après une première journée plus spécifiquement consacrée, ce mercredi, aux risques CMR (cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques) avec en particulier un focus sur les cancers de la vessie mais aussi un exemple de ce que peut faire un Chsct, exposé par Philippe Saunier, secrétaire (Cgt) du Chsct de la raffinerie de Total-Gonfreville (Normandie), le colloque de l’Inrs [1], à partir de ce jeudi, va s’atteler à des problématiques assez générales : processus de délivrance des attestations d’exposition, la sous-traitance, démarche de substitution, expertise toxicologique...
Pour illustrer un exemple de sous-estimation des risques, auxquels on pourrait pourtant répondre de manière assez simple, prenons le cas des poussières de bois.

Cancérogènes et allergisantes

Deuxième cause de cancers professionnels, les poussières de bois sont classées à la fois comme agents cancérogènes et allergisants [2].

Elles peuvent provoquer des cancers de l’ethmoïde (os formant le toit des fosses nasales) mais aussi du poumon, des asthmes, des sinusites chroniques, des conjonctivites, des eczéma et divers syndromes respiratoires. Ces poussières de bois, résidus plus ou moins fins de la transformation du bois, sont surtout présentes dans la construction. Mais pas seulement.

Couper ou scier du bois, le tronçonner, l’usiner et le poncer sont des activités courantes. Mais pour lesquelles on ne songe pas à se protéger, tant elles paraissent banales.

Et pourtant : 300 000 salariés, en France, sont exposés, estime-t-on, aux poussières de bois. Insidieuses, elles s’insinuent partout et sont facilement, pour les plus fines particules, inhalées. Elles peuvent se combiner à des polluants chimiques car les bois sont souvent traités : colles, tanins, alcaloïdes, solvants, vernis.

Une prévention encore peu dans les usages

La prévention, dans les métiers du bois, n’est pas une attitude naturelle, que ce soit de la part des employeurs ou des employés. A fortiori dans les toutes petites entreprises, très nombreuses dans ces secteurs d’activité.

Philippe, 47 ans, est ébéniste dans l’agglomération lyonnaise. Il travaille actuellement dans une entreprise artisanale où ils sont deux salariés. « Je porte un masque, mais pas tout le temps, reconnaît-il. J’en mets un si je sais que je vais par exemple avoir une activité de coupe sur une machine, pendant au moins une demi-heure. Si je le fais moins longtemps, je ne prends pas le temps d’en enfiler un. Pour d’autres activités, je ne le mets pas forcément non plus. C’est contraignant. »

Et c’est vrai. derrière un masque, on prend plus vite chaud, et il faut, surtout, s’habituer à le porter.

Captage des poussières par aspiration générale dans un atelier, captage aussi directement sur certaines machines à bois, nettoyage très régulier des locaux et des vêtements de travail, douches à disposition des salariés, masques à filtres FFP3 plutôt que FFP2 car ils sont plus efficaces contre les très fines particules, vérifications de la valeur limite d’exposition (Vlep), bonne organisation des locaux de travail, tout cela contribue à un mieux-être et une bonne prévention (3). Mais les bonnes pratiques ne sont encore pas monnaie courante.

Des régions innovent

Au cours d’une journée de réflexion sur cette problématique, organisée le mois dernier à Rodez par le Centre régional d’Innovation et de Transfert- de Technologie (Critt-Bois) de l’Aveyron [3].

Un centre de recherche qui apporte ses compétences dans le domaine du bois sur plusieurs régions : Auvergne, Aquitaine, Limousin, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées et Paca. Et va aujourd’hui, au-delà de sa compétence première sur les innovations technologiques, en mutualisant, pour les petites entreprises, l’achat d’appareils pour vérifier les teneurs en poussières de bois.

Un suivi médical pas assez rigoureux

Demeurent le problème de la délivrance des fiches d’exposition : « Ces fiches ne sont pas du tout faites dans les petites entreprises », confie Catherine Calais, médecin du travail dans le secteur Nord-Espalion (Aveyron), mais aussi du suivi médical des salariés.

Une nasofibroscopie, examen très fiable et relativement peu onéreux, devrait être assez régulièrement prescrit pour déceler les problèmes du nez. Mais, non recommandé par les textes en vigueur, il reste sous-prescrit.

De même, un scanner des sinus devrait être effectué pour déceler précocément un cancer de l’ethmoïde, plutôt qu’une radiographie, soulignent des praticiens. Surtout lorsque les expositions commencent à être anciennes.

Un constat que fait aussi Philippe, en région lyonnaise : « J’ai toujours eu droit au minimum légal, concernant le suivi médical : une radio des poumons tous les trois ou quatre ans. C’est tout. Dans aucune des entreprises où je suis passé - parfois de grosses entreprises - je n’ai vu de médecin du travail ou d’inspecteur du travail venir se rendre compte de nos conditions de travail. »

Aujourd’hui , où il est sur un pied d’égalité avec son employeur puisqu’ils partagent le même environnement de travail, il dit : « Avoir des conseils, y compris sur le plan technique, pour savoir comment organiser au mieux l’atelier, ce serait bien. Notre santé, forcément, à un moment donné, on s’y intéresse tous. »

Auteur : Anne-Marie Boulet, VIVA

[1] Voir vidéo : INRS : les cancers professionnels décortiqués
[2] Lire le dossier de l’Inrs consacré aux poussières de bois : www.inrs.fr
[3] Lire : Poussières de bois : un risque cancérogène pratiquement nié

Sites à consulter : www.critt-bois.com
et site de la Cram Midi-Pyrénées : www.cram-mp.fr

 

Sur le même sujet : " Poussières de bois : comment prévenir et diagnostiquer efficacement les cancers rhino-sinusien ? " Par Marianna Reyne, ActuEL-hse.fr (interview de Bernadette Valériaud, médecin du travail au sein du AIST)

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