Les installations de stockage (essentiellement les « racks à palettes» et « cantilevers ») sont des structures dont les dangers sont très largement sous-estimés par les exploitants de ces équipements.
Selon les statistiques de l’Assurance Maladie, l’entrepôt est le secteur de l’entreprise le plus accidentogène, devant le BTP. L’un des risque majeur est l’effondrement de la structure elle-même. Ces installations souffrent en effet d’une double problématique :
- La fragilité structurelle d’un tel équipement.
- L’inconscience collective des utilisateurs.
Fragilité structurelle des racks
Cette fragilité est masquée par une apparence de robustesse et un effet « masse » quand il est chargé. Mais un rack à palettes n’est qu’une structure squelettique, auto-stable, dont la stabilité n’est assurée que par la rigidité de ses composants, par la performance des accrochages lisses/montants et par les ancrages au sol (sauf dans le cas d’installations contreventées). Pour que les efforts et sollicitations soient correctement absorbés et transmis, il est nécessaire que les structures conservent une géométrie générale quasi-parfaite, et que l’ensemble de leurs composants conservent leurs caractéristiques géométriques initiales.
Hors tous les racks à palettes sont soumis au quotidien à de nombreuses sollicitations : impacts locaux, chocs, frottement du chariot ou des palettes sur la structure, poussées et tractions de mise en place des charges, effet dynamique des palettes lors d’une dépose brutale, pressions des châssis des chariots sur les montants quand les allées sont trop étroites, etc …
Pour toutes ces causes, il est donc rare que ces structures conservent longtemps leur bon état et leur intégrité.
Hors, ces structures ne sont pas conçues pour absorber des «chocs anormaux» d’exploitation ou des sollicitations répétées. Sous ces sollicitations prohibées, elles vont progressivement se déformer, perdre la géométrie qui assure leur stabilité, et perdre ainsi leur capacité d’absorption ou de résistance.
A noter qu’une telle installation est d’autant moins rigide et résistante, que les alvéoles sont plus grandes (lisses longues et niveaux espacés en hauteur).
Inconscience collective des charges et forces en jeux
Les utilisateurs n’ont souvent qu’une conscience toute relative des charges qu’ils manipulent quotidiennement. Les performances des engins modernes de manutention anesthésient la perception du poids des charges manutentionnées et des efforts développés par ces machines.
Quand un rack est impacté c’est tout le rack en tant que « meuble auto-stable » qui est sollicité et qui peut être mis en mouvement. Hors un tel « meuble auto-stable » peut représenter un cumul de charges stockées de plusieurs centaines de tonnes.
Le danger majeur : l'effondrement
Bien sûr, le risque de collision brutal « chariot / rack » est le plus évident. Il se traduit souvent par des dégâts spectaculaires, qui amènent l’exploitant à réagir. Après un tel accident, des mesures sont en général mises en oeuvre pour éviter son renouvellement : réparations ou remplacement des éléments détruits, mise en place de protections efficaces, sensibilisation de tous les acteurs aux risques, etc …
Mais les mauvaises habitudes reviennent vite.
La vraie source de danger est beaucoup plus pernicieuse : elle consiste en la destruction lente et progressive de l’installation par des atteintes quotidiennes aux structures (chocs, tractions, poussées, desserrages des ancrages et de la boulonnerie, surcharges localisées ou ponctuelles). Ce véritable travail de sape fragilise progressivement l’installation dans une insouciance généralisée, en impactant et réduisant les capacités nominales des différents composants et en altérant la géométrie générale des meubles qui pourtant devrait rester quasi-parfaite pour assurer leur stabilité.
Actions préventives
Pour les installations neuves
Avant toute mise en exploitation, il faut faire réaliser une réception contractuelle de l’installation par un tiers indépendant (ni monteur, ni fournisseur) qui devra idéalement valider les aspects suivants :
- La qualité du montage réalisé (géométrie des structures et respect de l’ensemble des règles de l ‘art)
- Présence et adéquation des éléments de sécurité passive
- La concordance entre le projet calculé et la réalité installée
- L’adéquation entre l’installation réalisée et l’usage prévu (nature des charges, poids, etc..)
- L’adéquation entre l’installation réalisée et les caractéristiques des engins de desserte
Pour les installations déjà en exploitation
Il faut réaliser des visites annuelles de contrôle pour identifier tous les composants déformés ou impactés qui devront être remplacés. En procédant ainsi, on permettra à l’installation de conserver ses capacités nominales et on évitera sa lente dégradation invisible.
Mais pour être pertinente et efficace, une telle visite ne doit pas se contenter de relever l’état des matériels, en listant les composants manquants ou défectueux. Elle doit également et impérativement poser un diagnostic sur les différentes adéquations dont dépend l’intégrité du rack et sur son environnement :
- Adéquation structures / charges stockées
- Adéquation engins de desserte / structures
- Adéquations engins de desserte / implantation
- Présence et pertinence de la signalisation et de la signalétique
- Présence et pertinence des accessoires de sécurité passive
- Circulations
En effet, dans une installation de racks à palettes, seuls les racks sont immuables alors que l’ensemble de leur environnement est susceptible de se modifier au fil des besoins de l’exploitation :
- Modification des caractéristiques des charges stockées
- Renouvellement régulier des engins de desserte
- Ré affectation des zones libres au sol
- Changement du mode d’exploitation
- etc...
Il faut donc régulièrement valider la cohérence globale de l’ensemble de l’entrepôt, et de ses équipements entre eux.
Pour toutes les installations
Une maintenance permanente et systématique des racks à palettes est indispensable au maintien de leur sécurité. Un rack à palettes doit être régulièrement contrôlé et être exploité avec conscience. Les visites annuelles de contrôle doivent être suivies d’opérations de remise en état et de remplacement de pièces hors d’usage.
C’est à ces seules conditions que les effondrements de racks pourront être évités, ou que leurs conséquences seront limitées si un accident imparable devait malgré tout survenir.
Le cadre réglementaire
Différents textes concernant l’utilisation et la maintenance des racks à palettes :
- Des recommandations CRAM (ex : SP1120 de CRAM Rhône-Alpes)
- Des recommandations INRS (Ed771)
- La norme NF EN 15635 Janvier 2009
Tous ces documents ne sont pas, à ce jour, d’application obligatoire mais ils forment les Règles de l’Art de la profession.
Ces différents textes ont une trame générale identique, mais diffèrent sur l’étendue des domaines couverts et sur les critères d’évaluation de l’état des composants. Ils n’intègrent aucune pondération selon le type d’installation, selon ses dimensions et caractéristiques, selon la localisation des défauts constatés. Cela rend leur application «au pied de la lettre» pour le moins délicate.
Seul un professionnel expérimenté et indépendant pourra apporter à l’exploitant utilisateur de tels racks une appréciation cohérente et motivée.
Auteur : Christian WODLI – Expert – Directeur Technique ONIX-Expertise.
Voici la liste des différentes solutions pour les Risques d'effondrements (chutes d'objets).