La route représente près de 50% des accidents mortels liés au travail et "il faut savoir que 7 à 8% des accidents graves impliquent l'usage du téléphone au volant", précise Jean-Claude Robert, président de l'association PSRE spécialisée dans la maîtrise du risque routier en entreprise. De nombreuses expérimentations comportant des mises en situation réelle ont prouvé que le risque d'accident est nettement augmenté si le conducteur est amené à tenir une conversation téléphonique, quel que soit le dispositif technique utilisé (oreillette, kit piéton, kit mains libres).
Téléphone au volant : une charge mentale supplémentaire
Jean-Claude Robert explique que "l'activité de conduite est une activité à part entière, impliquant plus encore l'anticipation des dangers potentiels que de simples "automatismes". L'utilisation du kit main libre, par exemple, ne permet pas d'être maître de sa conduite du fait de la charge mentale qu'elle implique et de l'amoindrissement des facultés physiologiques (champ de vision restreint, iris immobiles…)".
Le kit mains libres ne sécurise rien
L'association PSRE met donc en garde contre les publicités pour des équipements tels que les systèmes de téléphonie mobiles installés à bord des véhicules d'entreprise : "certains équipementiers ou constructeurs incitent les entreprises à équiper leur flotte automobile de tels systèmes sous l'argument, totalement faux, que les salariés conducteurs pourront travailler en sécurité en téléphonant et conduisant en même temps".
L'obligation de sécurité de l'employeur va plus loin que la règlementation
"Il n'y a pas aujourd'hui d'interdiction réelle et formelle du téléphone au volant à travers les kits mains libres. Ils sont encore "tolérés" par une réglementation "à double lecture", c'est-à-dire qui permet l'utilisation de ces équipements à risque et impose à la fois de rester maître de sa conduite et de son véhicule". Néanmoins, les règles prudentielles dans le monde du travail sont plus strictes. PSRE rappelle par ailleurs qu'une recommandation a été adoptée par la Commission des Accidents du Travail et des Maladies Professionnelles le 5 novembre 2003. Elle prévoit la suppression de ce risque ou sa réduction au maximum.
L'employeur peut voir sa responsabilité engagée
"Dans le cadre d'un accident routier ayant entraîné des blessures aux personnes, une invalidité ou un décès, l'enquête sur l'activité téléphonique précédant l'accident est désormais de mise et l'employeur peut voir sa responsabilité engagée même s'il n'est pas personnellement présent dans le véhicule", rappelle M. Robert. A défaut d'appliquer les règles de sécurité nécessaires, le chef d'entreprise, mais aussi les dirigeants responsables de l'activité des conducteurs, peuvent se voir infliger des amendes pouvant atteindre 75 000€ ou des peines allant jusqu'à 5 ans de prison voire plus en cas de circonstances aggravantes."S'il n'y a pas eu encore à ce jour de mise en examen de chef d'entreprise sur la question de l'utilisation des kits mains libres au volant, cela va venir", prévient le président de PSRE. "Les tribunaux commencent à être sensibilisés et prennent en considération cet aspect en regardent si la pratique du téléphone au volant au sein de l'entreprise est généralisée ; à partir de là ils s'interrogeront sur la responsabilité de l'employeur", ajoute M. Robert.
Des solutions organisationnelles plutôt qu'une interdiction
"Plutôt qu'une interdiction légale du kit mains libres, nous souhaitons, à PSRE, que les chefs d'entreprise fassent correctement leur analyse des risques professionnels dans le cadre du document unique, en y intégrant le risque routier et l'utilisation du téléphone au volant, et en prenant les mesures de prévention et d'organisation du travail nécessaires", insiste Jean-Claude Robert. Ce dernier ajoute qu'il faut se méfier des solutions faciles consistant à interdire purement et simplement dans le règlement intérieur de l'entreprise, l'utilisation des équipements de communication au volant. Des solutions organisationnelles existent. De plus en plus d'entreprises sont par exemple amenées à supprimer les interfaces d'accès direct des appels des clients, vers le salarié conducteur. Les appels des clients arrivent désormais sur une plate-forme. On pourrait aussi faire agir les opérateurs ajoute le président de l'association : "on devrait pourvoir leur demander de mettre en place des messages d'absence liés à la conduite afin d'informer les interlocuteurs".
Documents joints : Le rapport
Auteur : Par Marianna Reyne, actuEL-HSE
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