"Même si le taux de mortalité lié à un accident du travail est en déclin et que de nombreuses entreprises prétendent que la sécurité est une priorité, la sécurité au travail dans son ensemble semble stagner. Pourquoi ?" C'est cette interrogation qui a amené DuPont Sustainable Solutions, l'activité de conseil de DuPont en gestion de la sécurité et développement durable, à lancer son enquête auprès de 300 grandes entreprises dans toute l'Europe.
Performance et sécurité, un lien pas très prégnant
Dans la présentation des résultats tirés de l'enquête DuPont souligne les contradictions des entreprises. Si on demande est-ce que performance économique et sécurité sont liés, 95% répondront "oui". Mais quand on demande quelles sont les priorités stratégiques de l'entreprise, la sécurité arrive après la productivité, la qualité ou la réduction des coûts. En outre, seuls 15% des participants à l'enquête citent les préoccupations de productivité, coûts et qualité comme des éléments incitatifs à une plus grande sécurité. En France, les deux motivations les plus fortes pour la sécurité restent la conformité avec la règlementation (68%) et l'image de l'entreprise (48%).
La politique de sécurité est peu évaluée
Pour DuPont, la sécurité reste trop souvent comme un objectif un peu flou. Ainsi, un tiers des entreprises ne mesure pas leur performance en matière de sécurité. Et plus de la moitié des répondants estiment que leur entreprise ne se fixe pas les bons objectifs en matière de sécurité. DuPont s'interroge donc sur la quantité et la qualité des systèmes d'évaluation des performances et donc l'existence même de politique construite en la matière. La France fait partie des exceptions : 72% des répondants mesurent leurs performances par des indicateurs spécifiques.
"Responsable oui, redevable non !"
C'est ainsi que les consultants analysent les résultats de l'enquête. En France, en Italie ou au Portugal, un tiers des travailleurs pensent qu'ils n'ont pas suffisamment de pouvoir pour suspendre les opérations dans le but d'une blessure. L'engagement de la hiérarchie est souvent verbal mais les actes suivent rarement. Seuls 20% des personnes interrogées estiment que leur hiérarchie prend en compte la sécurité dans leur processus de décision (34% pour la France). DuPont qualifie même certains comportements des directions comme de "l'aversion à la responsabilité vis-à-vis de la sécurité", qui se traduit généralement par l'absence de structures permettant la mise en oeuvre d'action sur les lieux de travail.
La place paradoxale du management
Les statistiques concernant l'importance du savoir et du partage d'expérience révèlent pour la France un paradoxe certain. Ainsi, 58% des entreprises pensent que les managers sont à même de participer au maintien et à la création d'un environnement sûr - c'est le chiffre le plus haut d'Europe. Pour autant, ils ne sont que 24% à penser que ces mêmes managers communiquent activement avec leurs supérieurs ou leurs collègues sur ce sujet - c'est le chiffre le plus bas d'Europe.
Les presqu'accidents sont peu utilisés en France
Seules 60% des entreprises françaises interrogées pensent investir significativement dans la sécurité - C'est 10% de moins que tous les autres pays, la moyenne se situant à 82%. Cependant, la France est aussi un des pays où les personnes interrogées s'accordent à dire que la sécurité fait partie de tout ce qu'ils entreprennent (78%). La forme privilégiée en France pour aborder les questions de sécurité reste la formation alors que les formes plus informelles comme les réunions révèlent un taux plus bas en France qu'ailleurs (seules 38% ont une plus d'une réunion par mois) et les français sont ceux qui enquêtent le moins sur les presqu'accidents (28% contre 51% en Allemagne par exemple). Quant à savoir qui est le plus pertinent dans l'entreprise pour mettre en oeuvre la stratégie d'amélioration de la sécurité, les réponses sont très variables : 30% pour les responsables HSE, 16% pour les chefs d'équipe, 22% pour le management stratégique et 14% pour les ressources humaines.
Document joint : Synthèse de l'enquête (en anglais)
Auteur : Par Sophie Hoguin , actuEL-HSE